Le directeur général de Safran, Olivier Andriès, a fait le point pour Challenges sur les enjeux de cette fin d’année et est particulièrement revenu sur le veto du gouvernement italien au rachat du groupe transalpin Microtecnica, prévu dans le cadre de l’acquisition des activités de commandes de vol de l’américain Collins Aerospace. Le décret italien évoquant une « menace pour la sécurité nationale » ne passe pas. « Le groupe était sous contrôle américain depuis 20 ans, ça n’a jamais gêné personne, pointe le dirigeant. Et là, le rachat par un groupe français, donc européen, est défini comme une menace ? Ça n’a pas de sens ! Le message envoyé est inquiétant pour la Défense européenne ». Pour justifier son décret de blocage, Rome évoque des inquiétudes sur la livraison de pièces détachées aux avions de combat Eurofighter et Tornado de l’armée de l’Air italienne. Or, Olivier Andriès rappelle : « Nous sommes déjà un fournisseur de l’Eurofighter, dont nous fabriquons le train d’atterrissage au Royaume-Uni ». Il assure que Safran n’exclut pas de contester en justice la décision italienne, tout en espérant une « ouverture politique avant la fin de l’année » qui permettrait d’éviter la confrontation. Faute d’avancée, un autre scénario serait de renégocier les conditions de l’opération avec Collins Aerospace, en excluant, cette fois, l’italien Microtecnica qui représente environ 15% de l’ensemble. Sur un autre sujet, si la coopération avec l’allemand MTU pour la conception des moteurs du futur chasseur du programme SCAF se passe bien, la politique restrictive de Berlin sur les ventes d’armement l’inquiète néanmoins. « L’Allemagne est en train de bloquer l’exportation d’Eurofighter en Arabie saoudite. Si elle le fait aujourd’hui sur l’Eurofighter, elle peut très bien le faire sur le SCAF demain. Il faut établir des règles claires sur toute la durée du programme, soit 50 ans », prévient-il. « Si on ne vend le SCAF qu’aux membres de l’OTAN, c’est la chronique d’une mort annoncée : on n’en vendra aucun ». Le dirigeant se refuse également au transfert à Bruxelles de l’autorisation des exportations d’armement. « C’est une ligne rouge très claire pour la France », conclut Olivier Andriès.